Réponse courte : acheter local a un impact négligeable devant le régime (carné ou non).
đ Contrairement Ă ce quâon peut penser, le transport des fruits et lĂ©gumes est souvent non significatif dans leur empreinte carbone (tant quâils ne prennent pas lâavion), câest-Ă -dire environ 11% du total de leur empreinte. Le mode de production (sous serre chauffĂ©e ou pas, conservĂ© en chambre froide ou pas, …) a un impact bien plus important.
đ Par exemple une tomate de VendĂ©e, qui a poussĂ© sous serre chauffĂ©e, a Ă©mis 4 fois plus de CO2 que la mĂȘme tomate venant dâEspagne, oĂč elle a poussĂ© au soleil *.
â âAh mais câest parce quâil faut prendre DE SAISON !â pouvez-vous penser.
Ăvidemment câest mieux, mais ce nâest pas nĂ©cessairement salvateur. Par exemple, des framboises ou un avocat bien de saison Ă©mettent Ă peu prĂšs autant quâune tomate hors saison, et plus quâune banane de Martinique ou une orange dâEspagne. Dans ces cas-lĂ , le transport en bateau ou en camion, amorti sur une quantitĂ© considĂ©rable de produits, ne contribue que trĂšs peu Ă lâempreinte globale.
đ„© âOK⊠mais mon bĆuf, câest de la bonne viande, du boucher du coinâ peut-on entendre souvent…
Oui⊠et bien câest pareil. Le transport câest Ă peu prĂšs rien du tout, comparĂ© Ă la premiĂšre source dâĂ©mission de gaz Ă effet de serre pour un bĆuf Ă savoir : ses rots*⊠qui Ă©mettent bien plus de mĂ©thane que le transport, mĂ©thane au pouvoir rĂ©chauffant 28 Ă 84 fois supĂ©rieur Ă celui du CO2. Sans compter les engrais, dĂ©jections, … qui Ă©mettent beaucoup de protoxyde dâazote, un gaz presque 300 fois plus rĂ©chauffant que le CO2. Bien sĂ»r, câest mieux de prendre un bĆuf français Ă©levĂ© en plein air quâun bĆuf amĂ©ricain en Ă©levage intensif⊠mais ça reste beaucoup, beaucoup plus nĂ©faste pour le climat que nâimporte quoi de vĂ©gĂ©tal.
* Les ruminants (boeuf, mouton, chĂšvre), de par leur systĂšme de digestion anaĂ©robie, Ă©mettent du mĂ©thane en mangeant… mĂȘme si câest la bonne prairie bio, sans OGM, locale et toute belle.
Ceci nâempĂȘche pas les journalistes dâutiliser des titres fallacieux pour attirer du clic. Par exemple ici TerraEcco sâĂ©mouvait que les oranges aient un bilan carbone qui sâalourdissait du fait du transport… quand on regarde le graphe ci-dessus, il y a de quoi lever les yeux au ciel.
« Certes, mais comparons ce qui est comparable : jâai besoin de protĂ©ines ! »
Bien entendu, on ne peut pas se nourrir que de fruits et lĂ©gumes. Mais les protĂ©ines vĂ©gĂ©tales apportĂ©es par les lĂ©gumineuses et les fĂ©culents dans le cadre dâun rĂ©gime vĂ©gĂ©tarien sont bien moins Ă©missives que la viande (surtout la viande rouge), rapportĂ© Ă lâunitĂ© de protĂ©ines quâelles apportent :
đ± âEt le bio dans tout ça ?â.
Utiliser moins de pesticides câest forcĂ©ment une bonne idĂ©e pour la biodiversitĂ©. Mais par kg dâaliment, les systĂšmes bio dĂ©forestent plus, ânĂ©cessitent plus de terre, causent plus dâeutrophisation, utilisent moins dâĂ©nergie mais Ă©mettent autant de gaz Ă effet de serreâ. Donc le bio est favorable pour prĂ©server la biodiversitĂ©, mais ne change rien pour le climat.
âïž Conclusion ?
Bien entendu, il ne sâagit pas de pousser Ă acheter des aliments de lâautre bout du monde, hors saison et livrĂ©s par avion.
Simplement :
- avant de parler de local ou de saison, il faut vĂ©gĂ©taliser le plus possible son alimentation. Câest ce qui, de loin, est le plus favorable en termes dâimpact sur le climat.
- Si on tient absolument Ă garder de la viande, le poulet (ou le porc) sont des alternatives bien meilleures que le bĆuf (du moins pour le climat !).
- Une fois lâalimentation vĂ©gĂ©talisĂ©e, le critĂšre de âlocalâ devrait ĂȘtre placĂ© bien derriĂšre le critĂšre de âcomment câest produitâ (serre/pas serre ? chambre froide ?) et âest-ce que câest la saison lĂ oĂč câest produit, mĂȘme si câest produit outre atlantique (tant que ça vient en bateau).
- Le climat, câest compliquĂ©. On pense savoir mais âle bon sensâ est trompeur. Pour cela, nâhĂ©sitez-pas Ă organiser une confĂ©rence ou un climatelier dans votre organisation, pour en apprendre plus sur le sujet !
Sources :
*2.24 kgCO2e/kg vs 0.665 kgCO2e/kg resp., source ADEME.
Pour les fraises : 3.01 kgCO2e/kg vs 0.772 resp.
Ainsi que la base empreinte des repas.
Coefficients retenus en kgCO2/kg de produit :âŻBoeuf (biftek) : 35.8, poulet : 5.16, oeuf : 2.6, riz :âŻ1.4, lĂ©gumineuses : 0.79, pĂątes : 0.495, pommes de terre :âŻ0.077